Condamné à mort! - Condenado a muerte |
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XIII |
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J'ai vu, ces jours passés, une chose hideuse. Il était à peine jour, et la prison était pleine de bruit. On entendait ouvrir et fermer les lourdes portes, grincer les verrous et les cadenas de fer, carillonner les trousseaux de clefs entrechoqués à la ceinture des geôliers, trembler les escaliers du haut en bas sous des pas précipités, et des voix s'appeler et se répondre des deux bouts des longs corridors. Mes voisins de cachot, les forçats en punition, étaient plus gais qu'à l'ordinaire. |
Tout Bicêtre semblait rire, chanter, courir, danser. Moi, seul muet dans ce vacarme, seul immobile dans ce tumulte, étonné et attentif, j'écoutais. Un geôlier passa. Je me hasardai à l'appeler et à lui demander si c'était fête dans la prison. -Fête si l'on veut! me répondit-il. C'est aujourd'hui qu'on ferre les forçats qui doivent partir demain pour Toulon. |
Voulez-vous voir, cela vous amusera. C'était en effet, pour un reclus solitaire, une bonne fortune qu'un spectacle, si odieux qu'il fût. J'acceptai l'amusement. Le guichetier prit les précautions d'usage pour s'assurer de moi, puis me conduisit dans une petite cellule vide, et absolument démeublée, qui avait une fenêtre grillée, mais une véritable fenêtre à hauteur d'appui, et à travers laquelle on apercevait réellement le ciel. - |
Tenez, me dit-il, d'ici vous verrez et vous entendrez. Vous serez seul dans votre loge, comme le roi. Puis il sortit et referma sur moi serrures, cadenas et verrous. La fenêtre donnait sur une cour carrée assez vaste, et autour de laquelle s'élevait des quatre côtés, comme une muraille, un grand bâtiment de pierre de taille à six étages. |
Rien de plus dégradé, de plus nu, de plus misérable à l'oeil que cette quadruple façade percée d'une multitude de fenêtres grillées auxquelles se tenaient collés, du bas en haut, une foule de visages maigres et blêmes, pressés les uns audessus des autres, comme les pierres d'un mur, et tous pour ainsi dire encadrés dans les entre-croisements des barreaux de fer. |
C'étaient les prisonniers, spectateurs
de la cérémonie en attendant leur jour d'être acteurs. On eût dit des âmes en peine aux soupiraux du purgatoire qui donnent sur l'enfer. |
Tous regardaient en silence la cour vide encore. Ils attendaient. Parmi ces figures éteintes et mornes, çà et là brillaient quelques yeux perçants et vifs comme des points de feu. |
Le carré de prisons qui enveloppe la cour ne se referme pas sur luimême. Un des quatre pans de l'édifice (celui qui regarde le levant) est coupé vers son milieu, et ne se rattache au pan voisin que par une grille de fer. Cette grille s'ouvre sur une seconde cour, plus petite que la première, et, comme elle, bloquée de murs et de pignons noirâtres. |
Tout autour de la cour principale, des bancs de pierre s'adossent à la muraille. Au milieu se dresse une tige de fer courbée, destinée à porter une lanterne. |
Midi sonna. Une grande porte cochère, cachée sous un enfoncement, s'ouvrit brusquement. Une charrette, escortée d'espèces de soldats sales et honteux, en uniformes bleus, à épaulettes rouges et à bandoulières jaunes, entra lourdement dans la cour avec un bruit de ferraille. C'était la chiourme et les chaînes. |
Au même instant, comme si ce bruit réveillait tout le bruit de la prison, les spectateurs des fenêtres, jusqu'alors silencieux et immobiles, éclatèrent en cris de joie, en chansons, en menaces, en imprécations mêlées d'éclats de rire poignants à entendre. On eût cru voir des masques de démons. Sur chaque visage parut une grimace, tous les poings sortirent des barreaux, toutes les voix hurlèrent, tous les yeux flamboyèrent, et je fus épouvanté de voir tant d'étincelles reparaître dans cette cendre. |
Cependant les argousins, parmi lesquels on distinguait, à leurs vêtements propres et à leur effroi, quelques curieux venus de Paris, les argousins se mirent tranquillement à leur besogne. L'un d'eux monta sur la charrette, et jeta à ses camarades les chaînes, les colliers de voyage, et les liasses de pantalons de toile. |
Alors ils se dépecèrent le travail ; les uns allèrent étendre dans un coin de la cour les longues chaînes qu'ils nommaient dans leur argot les ficelles ; les autres déployèrent sur le pavé les taffetas, les chemises et les pantalons ; tandis que les plus sagaces examinaient un à un, sous l'oeil de leur capitaine, petit vieillard trapu, les carcans de fer, qu'ils éprouvaient ensuite en les faisant étinceler sur le pavé. |
Le tout aux acclamations railleuses des prisonniers, dont la voix n'était dominée que par les rires bruyants des forçats pour qui cela se préparait, et qu'on voyait relégués aux croisées de la vieille prison qui donne sur la petite cour. |
Quand ces apprêts furent terminés, un monsieur brodé en argent, qu'on appelait monsieur l'inspecteur, donna un ordre au directeur de la prison ; et un moment après, voilà que deux ou trois portes basses vomirent presque en même temps, et comme par bouffées, dans la cour, des nuées d'hommes hideux, hurlants et déguenillés. C'étaient les forçats. |
À leur entrée, redoublement de joie aux fenêtres. Quelques-uns d'entre eux, les grands noms du bagne, furent salués d'acclamations et d'applaudissements qu'ils recevaient avec une sorte de modestie fière. La plupart avaient des espèces de chapeaux tressés de leurs propres mains avec la paille du cachot, et toujours d'une forme étrange, afin que dans les villes où l'on passerait le chapeau fît remarquer la tête. |
Ceux-là étaient plus applaudis encore. Un, surtout, excita des transports d'enthousiasme ; un jeune homme de dix-sept ans, qui avait un visage de jeune fille. Il sortait du cachot, où il était au secret depuis huit jours ; de sa botte de paille il s'était fait un vêtement qui l'enveloppait de la tête aux pieds, et il entra dans la cour en faisant la roue sur lui-même avec l'agilité d'un serpent. |
C'était un baladin condamné pour vol. Il y eut une rage de battements de mains et de cris de joie. Les galériens y répondaient, et c'était une chose effrayante que cet échange de gaietés entre les forçats en titre et les forçats aspirants. |
La société avait beau être là, représentée par les geôliers et les curieux épouvantés, le crime la narguait en face, et de ce châtiment horrible faisait une fête de famille. |
À mesure qu'ils arrivaient, on les poussait, entre deux haies de gardeschiourme, dans la petite cour grillée, où la visite des médecins les attendait. C'est là que tous tentaient un dernier effort pour éviter le voyage, alléguant quelque excuse de santé, les yeux malades, la jambe boiteuse, la main mutilée. Mais presque toujours on les trouvait bons pour le bagne ; et alors chacun se résignait avec insouciance, oubliant en peu de minutes sa prétendue infirmité de toute la vie. |
La grille de la petite cour se rouvrit. Un gardien fit l'appel par ordre alphabétique ; et alors ils sortirent un à un, et chaque forçat s'alla ranger debout dans un coin de la grande cour, près d'un compagnon donné par le hasard de sa lettre initiale. Ainsi chacun se voit réduit à lui-même ; chacun porte sa chaîne pour soi, côte à côte avec un inconnu ; et si par hasard un forçat a un ami, la chaîne l'en sépare. Dernière des misères! |
Quand il y en eut à peu près une trentaine de sortis, on referma la grille. Un argousin les aligna avec son bâton, jeta devant chacun d'eux une chemise, une veste et un pantalon de grosse toile, puis fit un signe, et tous commencèrent à se déshabiller. Un incident inattendu vint, comme à point nommé, changer cette humiliation en torture. |
Jusqu'alors le temps avait été assez beau, et, si la bise d'octobre refroidissait l'air, de temps en temps aussi elle ouvrait çà et là dans les brumes grises du ciel une crevasse par où tombait un rayon de soleil. Mais à peine les forçats se furent-ils dépouillés de leurs haillons de prison, au moment où ils s'offraient nus et debout à la visite soupçonneuse des gardiens, et aux regards curieux des étrangers qui tournaient autour d'eux pour examiner leurs épaules, le ciel devint noir, une froide averse d'automne éclata brusquement, et se déchargea à torrents dans la cour carrée, sur les têtes découvertes, sur les membres nus des galériens, sur leurs misérables sayons étalés sur le pavé. |
En un clin d'oeil le préau se vida de tout ce qui n'était pas argousin ou galérien. Les curieux de Paris allèrent s'abriter sous les auvents des portes. Cependant la pluie tombait à flots. On ne voyait plus dans la cour que les forçats nus et ruisselants sur le pavé noyé. |
Un silence morne avait succédé à leurs bruyantes bravades. Ils grelottaient, leurs dents claquaient ; leurs jambes maigries, leurs genoux noueux s'entrechoquaient ; et c'était pitié de les voir appliquer sur leurs membres bleus ces chemises trempées, ces vestes, ces pantalons dégouttant de pluie. La nudité eût été meilleure. |
Un seul, un vieux, avait conservé quelque gaieté. Il s'écria, en s'essuyant avec sa chemise mouillée, que cela n'était pas dans le programme ; puis se prit à rire en montrant le poing au ciel. |
Quand ils eurent revêtu les habits de route, on les mena par bandes de vingt ou trente à l'autre coin du préau, où les cordons allongés à terre les attendaient. Ces cordons sont de longues et fortes chaînes coupées transversalement de deux en deux pieds par d'autres chaînes plus courtes, à l'extrémité desquelles se rattache un carcan carré, qui s'ouvre au moyen d'une charnière pratiquée à l'un des angles et se ferme à l'angle opposé par un boulon de fer, rivé pour tout le voyage sur le cou du galérien. Quand ces cordons sont développés à terre, ils figurent assez bien la grande arête d'un poisson. |
On fit asseoir les galériens dans la boue, sur les pavés inondés ; on leur essaya les colliers ; puis deux forgerons de la chiourme, armés d'enclumes portatives, les leur rivèrent à froid à grands coups de masses de fer. C'est un moment affreux, où les plus hardis pâlissent. Chaque coup de marteau, assené sur l'enclume appuyée à leur dos, fait rebondir le menton du patient ; le moindre mouvement d'avant en arrière lui ferait sauter le crâne comme une coquille de noix. |
Après cette opération, ils devinrent sombres.
On n'entendait plus que le grelottement des chaînes, et par
intervalles un cri et le bruit sourd du bâton des gardes-chiourme
sur les membres des récalcitrants. Il y en eut qui pleurèrent
; les vieux frissonnaient et se mordaient les lèvres. Je
regardai avec terreur tous ces profils sinistres dans leurs cadres
de fer. Ainsi, après la visite des médecins, la visite des geôliers ; après la visite des geôliers, le ferrage. Trois actes à ce spectacle. |
Un rayon de soleil reparut. On eût dit qu'il mettait le feu à tous ces cerveaux. Les forçats se levèrent à la fois, comme par un mouvement convulsif. Les cinq cordons se rattachèrent par les mains, et tout à coup se formèrent en ronde immense autour de la branche de la lanterne. |
Ils tournaient à fatiguer les yeux. Ils chantaient une chanson du bagne, une romance d'argot, sur un air tantôt plaintif, tantôt furieux et gai ; on entendait par intervalles des cris grêles, des éclats de rire déchirés et haletants se mêler aux mystérieuses paroles ; puis des acclamations furibondes ; et les chaînes qui s'entre-choquaient en cadence servaient d'orchestre à ce chant plus rauque que leur bruit. Si je cherchais une image du sabbat, je ne la voudrais ni meilleure ni pire. |
On apporta dans le préau un large baquet. Les gardes-chiourme rompirent la danse des forçats à coups de bâton, et les conduisirent à ce baquet dans lequel on voyait nager je ne sais quelles herbes dans je ne sais quel liquide fumant et sale. Ils mangèrent. |
Puis, ayant mangé, ils jetèrent sur le pavé ce qui restait de leur soupe et de leur pain bis, et se remirent à danser et à chanter. Il paraît qu'on leur laisse cette liberté le jour du ferrage et la nuit qui le suit. |
J'observais ce spectacle étrange avec une curiosité si avide, si palpitante, si attentive, que je m'étais oublié moi-même. Un profond sentiment de pitié me remuait jusqu'aux entrailles, et leurs rires me faisaient pleurer. |
Tout à coup, à travers la rêverie profonde où j'étais tombé, je vis la ronde hurlante s'arrêter et se taire. Puis tous les yeux se tournèrent vers la fenêtre que j'occupais. -Le condamné! le condamné! crièrentils tous en me montrant du doigt ; et les explosions de joie redoublèrent. |
Je restai pétrifié. J'ignore d'où ils me connaissaient et comment ils m'avaient reconnu. -Bonjour! bonsoir! me crièrent-ils avec leur ricanement atroce. Un des plus jeunes, condamné aux galères perpétuelles, face luisante et plombée, me regarda d'un air d'envie en disant : -Il est heureux! il sera rogné! Adieu, camarade! |
Je ne puis dire ce qui se passait en moi. J'étais leur camarade en effet. La Grève est soeur de Toulon. J'étais même placé plus bas qu'eux ; ils me faisaient honneur. Je frissonnai. Oui, leur camarade! Et quelques jours plus tard, j'aurais pu aussi, moi, être un spectacle pour eux. |
J'étais demeuré à la fenêtre, immobile, perclus, paralysé. Mais quand je vis les cinq cordons s'avancer, se ruer vers moi avec des paroles d'une infernale cordialité ; quand j'entendis le tumultueux fracas de leurs chaînes, de leurs clameurs, de leurs pas, au pied du mur, il me sembla que cette nuée de démons escaladait ma misérable cellule ; je poussai un cri, je me jetai sur la porte d'une violence à la briser ; mais pas moyen de fuir. |
Les verrous étaient tirés en dehors. Je heurtai, j'appelai avec rage. Puis il me sembla entendre de plus près encore les effrayantes voix des forçats. Je crus voir leurs têtes hideuses paraître déjà au bord de ma fenêtre, je poussai un second cri d'angoisse, et je tombai évanoui. |
He presenciado en estos últimos días una escena lastimosa. Antes de salir el sol y se oía por toda la cárcel un ruido extraordinario. Se abrían y cerraban repetidamente sus pesadas puertas. Rechinaban los cerrojos y férreos candados en todas direcciones. Repiqueteaban chocándose entre sí los manojos de llaves, desde las cinturas de los careceleros. Temblaban de alto a bajo las escaleras a impulso de precipitados pasos y se llamaban y se respondían roncas voces a los estremos de los corredores. Mis vecinos de calabazo, los presos penitenciados, parecían más alegres que de costumbre. |
Todo Bicêtre, en fin, estaba cantando, riendo, corriendo y dando voces. Yo, solo mudo en medio de tanta algazara, solo ente inmoble en medio de tal tumulto, escuchaba admirado y atento, hasta que pasó un carcelero, a quien me aventuré a preguntar sie era día de fiesta en la cárcel. -Fiesta sie se quiere!- me respondió- porque es hoy cuando se hierran los forzados que salen mañana para Tolon. |
Si gusta usted verlo se divertirá bastante. En efecto, para un recluso solitario no dejaba de ser buena fortuna la de poder ver un espectáculo cualquier, por odioso que fuese. Y así acepte el convite. El carcelero, después de tomar las precauciones de estilo para asegurarse de mi persona, me llevó a una especie de celdilla absolutamente vacía con una rja de hierro a la altura regular, por la que se veía el cielo real y verdaderamente. |
-Vaya- me dijo- desde aquí podrá ustede ver y oir cuanto pase y estará usted solo en su palco lo mismo que el rey. - Con estas palabras me dejó en el nicho, echándole luego llaves, candados y cerrojos. Caía mi ventana a u patio cuadrado bastante grande, en derredor del cual se elevan por los cuatro lados otros tantos muros de piedra de seis pisos cada uno. |
No puede imaginarse punto de vista más desgradado, triste y desnudo que el de esta cuadruple fachada, llena toda de rejas de hierro, a las que estaba apiñado centenares de rostros pálidos y ojerosos y puestos e pila unos sobre otros o, por decirlo así engastados en la barras de hierro de las ventanas. |
Estos eran los de los presos,espectadores de la ceremonía, mientras llegaba el turno de ser actores de ella. Podían compararse a otras tantas almas e pena, subidas sobre los fogones del purgatorio que caen a los infiernos. |
Todos esperaban silenciosamente, mirando con atención hácia el patio, todavía vacío, pero cuando en cuando, entre aquellas cargas apagadas y melancólicas, se veían centellear como puntos de fuego algunos ojos penetrantes y vivos. |
El cuadrado de prisones en que está el patio circunscripot, no es exactamente completo. Uno de los cuatros lados del edifico (el que mira al oriente) está cortado por el medio y le unen al inmediato fuertes rejas de hierro, que dan a otro patio más pequeño, también rodeado de paredes, rejas y ornatos negruzcos. |
Al rededor del patio prinicipal hay ciertos poyete o bancos de piedra con las paredes por respaldo y en medio una barra de hierro doblada como lo báculos, de la que se cuelga el farol. |
Al dar las doce se abrió de repente cierta puerta cochera bastante grande oculta por un receso de la pared y salió pesadamente con ruido de hierros un carro acompañodo de varios soldados, súcios y de mal aspecto, con uniformes azules, ginetas encarnadad y bandoleras pajizas. Estos eran los guardias que llaman chusma, con la cadenas para los forzados. |
En el mismo instante como si el ruido del carro hubiese despertado todo el estrépito de la cárcel, los espectadores hasta entonces inmobles y callados de las ventanas, levantaron una alta y alegre vocería y prorrumpieron en amenazas e imprecaciones mezcladas de cantares y de risotadas, que hubieran acongojado a cualquiera. Parecía que se asomaban por las rejas las máscaras de los condenados: En cada rostro apareció un gesto, todos los puños salieron cerrados de las barras de hierro, las voces todas ahullaro y llameaban centelleantes todos los ojos. Causaba espanto ver encenderse tantas chispas en aquellas cenizas. |
Los cabos de las galeras, entre quienes se distinguían por su vestidos limpios y su miedo, algunos curiosos de Paris, se pusieron tranquilamente a cumplir con su obligación. Uno de ellos se subió al carro, collares de camino y lios de pantalones de lienzo en él había y repartiendose luego el trabajo, |
se fueron algunos a un rincón de patio a estender las enormes cadenas (que llamaban algodones en su dialecto), desliaron otros en las losas sus tafetanes, esto es, las camisas y pantalones, mientras examinaban los más espertos a la vista del capitán vejezuelo chiquitin y fornido, los collares de hierro que probaron después en las piedras. |
A cada movimiento resonaban las aclamaciones burlescas de los presos, las cuales se perdían a veces en las ruidosas carcajadas de los forzados, para quienes se preparaban los hierros y que se veían en las ventanas de la cárcel antigua que cae al patio pequeño. |
Acabados ya los preparativos, un caballero cubierto de bordaduras de plata, a quien llamaban Señor inspector, dió sus órdenes al director de la cárcel y he aquí que dos o tres puertas empezaron a vomitar en el patio casi simultáneamente y como borbotones, nublados de hombres repugnantes, ahulladores y andrajosos. Estos rean los forzados. |
A su entrada se redoblaron los gritos de alegría de las ventanas, saludando en general a todos los galeotes y distinguiendo a los grandes hombres del presidio por medio de aclamaciones y aplauso especiales, que recibían ellos con una especie de modestia altiva. Muchos venían adornados con gorras hechas por ellos mismos de la paja del calabozo y formadas grotescamente a fin de que las ciudades por donde pasaran pudiese el sombrero llamar la atención a la cabeza que le llevaba. |
Los que así venían, gozaban dobles aplausus y uno particularmente fue acogido con tumultuoso y singular entusiasmo. Era este un mozo como de diez y siete años, con tan bellas facciones, que las hubiera envidiado una niña de la misma edad. Acababa en aquel momento de salir del calabozo, donde había estado ocho días sin comunicación y de la paja de la cama se había hecho un vestido que le cubría desde los pies hasta la cabeza. No contento con esta distinción, entró en el patio dando vueltas de campana con la agilidad de una serpiente. |
Había sido volatín e iba condenado por robo. Parecía que se hundía Bicêtre, según el ruido de las palmadas y de las congratulaciones. Los galeotes respondián con igual bulla y angustiaba el corazón aquel cambio de alegrías entre los presidiarios en probiedad y los aspirantes al presidio. |
En vano estaba alli la sociedad representada por los carceleros y amedrentados curiosos. El crímen se burlaba de ella cara a cara y convertía aquel castigo horrible en festividad doméstica. |
A medida que los forzados iban llegando, se les conducía por entre dos líneas de soldados al patio de las rejas, a donde les esperaba la visita de los médicos. Alli hacían todo el último esfuerzo para evitar el viaje, algegando alguna enfermedad. Los ojos malos, una pierna coja o mano mutilada, pero casi siempre se les encontraba hábiles para las galeras y cada cual se resignaba como podía, los mas con indiferencia y olvidando en pocos minutos su pretendida enfermedad crónica. |
Acabada la visita se abrió de nuevo la reja del patio chico y un caba pasó la lista por orden afabético. Salieron individualmente y fueron a alinearse los forzados a un rincón del otro patio, uno a uno y junto al compañero que la casualidad de su letra inicial le había deparado. Así cada hombre se ve allí reducido a si mismos, cada hombre lleva por si su cadena, pero la lado de un desconocido y si por acaso tuviese el presidario un amigo, la cadena se lo separaría. Última de las miserias! |
Cuando habría ya como treinta galeotes, se volvió a cerrar la reja y los alineó un cabo con el bastón, echando delante de ellos camisas, chaquetas y pantalones de lienzo crudo. Y haciendo después una señal empezaron todos a desnundarse. Un incidente inesperado vino entonce, como al propósito, a cambiar esta humillación en tormento. |
Había estado el tiempo bastante bueno toda la mañana y si el viento resfriaba el aire, también razgaba de cuando en cuando las nebulosidades blanquecinas del cielo, dejando paso a los apetecidos rayos del sol. Pero apenas se habían quitado los presidarios sus andrajos y en el instante mismo en que se ofrecián en pie y desnudos a la visita sospechosa de los guardas y a la curiosidad de los estraños que andaban alrededor de ellos para verles las espaldas, se oscureció el cielo repentinamente, empezó a caer un aguacero de otoño, descargandose a torrentes en el patio, sobre la cabeza descubierta de aquellos infelices, sobre sus miembros desnudos y sobre los míseros vestidos que yacían arrojados por el suelo. |
En un abrir y cerrar de ojos quedó el patio despejado de toso el mundo, escepto de los presidiarios y de sus guardias. Los curiosos de Paris fueron a refugiarse a la concavidades de los portales. Apretaba entretanto la lluvia y ya no se veían en el patio más que los presidiarios desnudos y heridos por el agua sobre el anegado suelo. |
Un triste silencio había sucedido a sus ruidosas bravatas. Estaban todos arrecidos y dando diente con diente, las piernas como estenuadas y temblándoles las rodillas. Era un dolor verlos cubrir los amoratados miembros con aquellas camisas empapgadas, con aquellas chaquetas y pantalones goteando. Cuán preferible no hubiese sido la desnudez! |
Solo un presidario, y viejo, conservó alguan alegría en mdeio de tanto martirio y dijo haciendo gestos al enjugarse el cuerpo con su mojada camisa: "Esto sí que estaba en el programa" - y se echó a reír después, amenazando al cielo con el puño cerrado. |
Ya vestidos todos de viaje, se les condujo en bandas de veinte o treinta al otro lado del patio, a donde le esperaban los cordones tendidos por el suelo. Se entiende por cordones largas y fuertes cadenas, añudadas transversalmente de dos en dos pies con otras cadenas mas cortas, a la estremidad de las cuales se halla suspendida una argolla o collar de hierro, que se abre por un lado con un gozne y se cierra por el otro con un pasador, remachándole después que está el collar en el cuello del galeote, quien lo lleva asi por todo el camino. Cuando se ven estos cordones extendidos se asemejan bastante a la espina dorsal de un pescado. |
Mandaron luego sentar los presidarios en el fango de las inundadas losa para probarles los collares y dos herreros de la casa, proveídos de yunques portátiles, se los remacharos a hierro frio y a grandes martillazos. Momento horroroso que hace preder el color aun a los más osados! Cada golpe que cae sobre el yunque que tienen apoyado a las espaldas, les estremece fuertemente la barba y las mejillas y al menor movimiento que hiciesen hácia atrás con la cabeza, el macho de hierro les partiría el cráneo como la cáscar de una nuez. |
Después de esta operación quedaron todos los semblantes sombríos, todas las linguas silenciosas. Ya no se oía más que el resonar de las cadenas y de cuando en cuando un grito o el ruido sordo de los bastonazos de los soldados sobre los miembros de los presidarios obstinados e inobedientes. Hubo algunos que lloraron con el mayor desconsuelo, temblaban los más viejos y se mordían los labios y no podían verse sin terror todos aquellos perfiles siniestros saliendo de los formidable collares de hierro. Así, después de la visita de los médicos vino la de los carceleros y después de esta el remache de los hierros. Drama de tres lastimoso actos. |
En esto iluminó el patio un rayo del sol y todos los forzados se levantaron a la vez como a impulsos de un movimiento convulsivo o como si su luzu hubiese pegado fuego a todos los cerebros. Los cinco cordones se dieron las manos y formaron rápidamente un círculo inmenso alrededor del pilar de hierro donde el farol se cuelga, |
volviéndose y revolviéndos de modo que mareaba mareaba el verlos. Este que digamos baile iba a veces acompañado de una canción del presidio, otras de un romance en su jerga, lleno de lamentosas cadencias o bien de alegresy furiosas entonaciones. Oíanse a intervalos grito desentonados y razgadas y palpitantes carcajadas que se mezclaban a las misteriosas palabras de los cantares o las aclamaciones furibundas con que los aplaudían, en tanto que el sonido a compás de las cadenas servía de orquesta a aquellas voces más roncas que su propio rechinar. El que deseara una imágen de las fiestas nocturnas de los incubos y brujas, no pudiera hallarla ni peor ni mejor que esta. |
Entró después en el patio una grande caldera a cuya vista rompieron los soldados a palos la danza de los galetoes y los llevaron alrededor de de ella para comer de ciertos yerbajos que andaban nadando por dentro un líquido súcio y humeante. Comieron. |
Concluído el banquete echaron por el suelo las sobras de la sopa y de pa de munición y continuaron su baile y música. Parece se les deja gozar de este dahogo el día que los hierran y la noche siguiente. |
Observaba yo aquel espectáculo extraordinario con tan ansiosa curiosidad, tan atento y absorto, que no me acordaba de mismo. Una profunda piedad había penetrado mis entrañas, haciéndome derramar lágrimas la risa aquellos desdichados, |
cuando ví al través de la penosa distracción a que me había entregado, pararse de repente y quedarse silenciosa la gritadora turba y volverse todos los ojos a la ventana que yo ocupaba. El reo de muerte! gritaron cien linguas al mismo tiempo, señalandome todos con el dedo, redoblando su algazara y las explosiones de su contento. |
Yo quedé inmoble y como petrificado, ignorando de dónde me conocían y cómo habían podido reconocerme. Buenos días! Buenas tarde!- me decían con amarga y atroz mofa y uno de los más jóvenes, de rostro luciente y aplomado, condenado a galeras a perpetuas, dijo mirándome con envidia. Dichos él, que irá pronto a la ene! A Dios, camarada! |
Imposible me sería pintar lo que pasaba en mi interior. Por qué no había yo de considerarme en efecto como su camarada? La plaza de Grève es hermana de Tolos y en caso de duda más bajo estaba yo que ellos. Demasiado me honraban llamándome su camarada! Entretanto temblaba todo mi cuerpo de escalofríos. Su camarada! En algunos días más yo les hubiera servido a ellos de espectáculo. |
Seguía yo yerto, inmoble y como fuera de mí en la ventana. Peor cuando ví los cinco cordones formados adelantándose hácia mí con palabas de una cordialidad infernal, cuando oí el estruendo tumultuoso de sus cadenas, paso y clamores, debajo ya de la reja, pensé que una legión de furias del abismo escalaba mi nicho miserable. Lancé un grito de horror y me arrojé despavorido contra la puerta con violencia bastante para romperla. Pero estaban echado los cerrojos por fuera. En vano golpeaba y llamaba al alcaide con voz frenética. No había medio de escaparse. |
Creí luego oir más cercanas las voces de los forzados. Me pareció que se veían sus horribles cabezas al borde de la ventana. Dí otro grito en mi agonía y caí por tierrra desmayado. |
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